âđ» Propos recueillis par Claire CAMINATI FARBER, Responsable Communication Startup Palace
Je vous donne rdv aujourd’hui sur le blog, et plus prĂ©cisĂ©ment dans la rubrique « Qui sont les fonds qui comptent vraiment » (coucou Maddyness, t’as vu j’ai changĂ© le nom de ma rubrique ! âșïž) pour vous prĂ©senter astoryaVC, dont vous avez forcĂ©ment dĂ©jĂ entendu parler.
Florian Graillot, co-fondateur (et apparemment grand fan du sage J. Bieber), a bien voulu répondre à mes questions. Voici ses réponses !
đHello Florian, merci dâavoir acceptĂ© de rĂ©pondre Ă mes questions sur le blog de Startup Palace. Une bonne occasion de te prĂ©senter et dâexpliquer ce que vous faites chez astoryaVC. Alors, câest parti ! Qui es-tu monsieur Graillot ? Et que faisais- tu avant le lancement d’astoryaVC, il y a 5 ans ?
Salut Claire, merci beaucoup pour lâopportunitĂ© de prĂ©senter ce que nous faisons chez astoryaVC !
Pour me prĂ©senter briĂšvement, je suis Florian, co-fondateur dâastoryaVC, et ça fait une quinzaine dâannĂ©es que jâinvestis dans des startups. Toujours dans la tech – ayant un background dâingĂ©nieur – ce fut dâabord de maniĂšre gĂ©nĂ©raliste en France, puis je me suis spĂ©cialisĂ© dans lâInsurTech, avec un pĂ©rimĂštre EuropĂ©en cette fois-ci. Et depuis cinq ans maintenant, avec mon associĂ© Jan, nous gĂ©rons astoryaVC, qui est devenu lâinvestisseur InsurTech le plus actif et diverse dâEurope !
đCâest quoi astoryaVC concrĂštement et comment ça fonctionne ?
astoryaVC est un vĂ©hicule dâinvestissement qui prend des participations minoritaires, toujours, dans des sociĂ©tĂ©s ayant dĂ©veloppĂ© un produit, une technologie, en lien avec lâassurance. Nous avons donc un positionnement industriel trĂšs particulier et regardons des opportunitĂ©s partout en Europe. En effet, mĂȘme si nous sommes basĂ©s Ă Paris, seul ÂŒ de notre portefeuille est en France. LâInsurTech est vraiment dynamique partout en Europe !
đVous investissez dans quel type de startups et Ă quel niveau de maturitĂ© ?
Nous investissons avant tout dans des startups disposant dâun vĂ©ritable produit, dâune tech. Câest le socle de base pour que nous considĂ©rions un investissement. Nous investissons dâailleurs quand le produit est disponible. On ne parle pas de âfiniâ car un produit nâest par dĂ©finition jamais terminĂ©, mais il faut que lâon puisse prĂ©senter quelque chose de tangible si lâon souhaite pouvoir accĂ©lĂ©rer les processus de ventes, notre plus-value majeure si jâen crois les retours de nos sociĂ©tĂ©s en portefeuille.
Bref, âpost-produitâ câest comme cela que nous dĂ©finissons le âSeedâ qui est notre focus en matiĂšre de maturitĂ©. Et sâil fallait donner un chiffre, nous participons Ă des tours de table qui vont de 1 Ă 3mâŹ.
đPourquoi ce focus insurtech ?
Cela est liĂ© Ă notre parcours, Ă Jan et moi. Nous nous sommes rencontrĂ©s aux tous dĂ©buts de lâInsurTech en 2015. Jan Ă©tait dans les Ă©quipes innovations dâAllianz Trade, et jâĂ©tais chez AXA Ventures. On a donc la chance de naviguer dans lâInsurTech EuropĂ©enne depuis le dĂ©but ! Câest un Ă©lĂ©ment diffĂ©renciant fort, qui nous a convaincus dĂšs le dĂ©but de rester concentrĂ©s sur ce que nous connaissions le mieux. Et câest aussi grĂące Ă cette expĂ©rience que nous Ă©changeons si rĂ©guliĂšrement avec la plupart des assureurs du marchĂ©, ou que les startups InsurTech viennent nous voir, quelle que soit leur maturitĂ©.
Et au-delĂ , il nous semblait exister une opportunitĂ© de marchĂ© – toujours vĂ©rifiĂ©e aujourdâhui dâailleurs : les investisseurs dans lâInsurTech sont soit des fonds FinTech (qui consacrent par dĂ©finition 10% de leur temps Ă lâinsurtech, car câest ce que cela reprĂ©sente en terme de volumes investis) soit les assureurs eux-mĂȘmes qui se concentrent sur les startups plus matures (SĂ©ries A voire de plus en plus B ou C).
Il y avait donc de la place pour astoryaVC. Nous offrons ainsi Ă nos investisseurs assureurs la possibilitĂ© dâentrer – indirectement – dans des startups auxquelles ils ne pourraient accĂ©der directement. Et en consacrant 100% de notre temps Ă lâInsurTech, nous les alimentons Ă©galement en veille et intelligence, pour leur permettre de ne rien manquer des mouvements Ă l’Ćuvre dans lâinnovation assurantielle !
đCâest quoi ta vision du marchĂ© insurtech en ce moment ?
Comme dans tout lâĂ©cosystĂšme startup, lâInsurTech traverse une passe plus difficile. AprĂšs lâeuphorie de lâannĂ©e 2021, la relative quiĂ©tude de lâannĂ©e 2022, le marchĂ© se durcit en 2023. Les investisseurs sont plus prĂ©cautionneux, et on revient aux fondamentaux. Avec un grand retour de la notion de âprofitabilitĂ©â – qui nâaurait jamais dĂ» quitter lâĂ©cosystĂšme. Mais il serait faux de considĂ©rer que câest la fin de lâinnovation dans lâassurance. Dâune part car il y a encore beaucoup Ă faire (si lâon regarde la notation des applications des assureurs sur les app stores, si on regarde la quantitĂ© de papier encore brassĂ©e dans tel ou tel process, ou le niveau dâĂ©quipement Cloud des plus gros acteurs, il y a un Ă©cart important avec dâautres industries, mĂȘme avec le cousin bancaire). Par ailleurs, comme je le disais plus haut, prĂšs de la moitiĂ© des deals annoncĂ©s lâannĂ©e derniĂšre lâĂ©taient sous 3mâŹ. Câest un stock trĂšs intĂ©ressant de startups qui seront les prochaines licornes. Car oui, toutes les success stories ont dâabord Ă©tĂ© des startups en SeedâŠ.
Par ailleurs, Ă mesure que lâĂ©cosystĂšme Ă©volue, mature, on voit les startups se rapprocher du cĆur de mĂ©tier de lâassurance : lâanalyse et le pricing du risque. Ainsi lâannĂ©e derniĂšre, câest ÂŒ des deals qui ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s sur la partie âproduitâ de la chaĂźne de valeur, bien tirĂ©e par les ânouveaux risquesâ, comme la cyber assurance par exemple. Et mĂȘme pour la distribution, qui a toujours Ă©tĂ© la partie la plus active de la chaĂźne de valeur, les choses deviennent plus granulaires. AprĂšs une premiĂšre vague de distribution directe, des startups sont venues proposer des outils pour les courtiers & agents (les canaux de distribution majeurs) et plus rĂ©cemment on a assistĂ© Ă une Ă©mergence de lâassurance embarquĂ©e, permettant Ă des acteurs tiers de proposer de lâassurance dans leurs parcours de ventes.
Et au-delĂ il y a encore beaucoup dâopportunitĂ©s dâamĂ©liorer lâefficacitĂ© opĂ©rationnelle comme de proposer de nouvelles expĂ©riences clients ou des produits. Nous ne sommes quâaux dĂ©but de lâInsurTech qui plus est quand on compare les montants investis : lâannĂ©e derniĂšre câest le mĂȘme ordre de grandeur quâune annĂ©e de dĂ©penses IT pour un assureur de premier planâŠ
đQuelles sont les belles histoires du portfolio astoryaVC ?
Je citerais Zelros qui est bien connue sur le marchĂ© Français pour travailler avec la plupart du Top 10 des assureurs. En sâappuyant sur des technologies dâintelligence artificielle, Zelros a dĂ©veloppĂ© un moteur de recommandation personnalisĂ© utilisĂ© par les courtiers, les agents, dans les process de vente. Cela augmente les taux de conversion et les capacitĂ©s de ventes additionnelles. Câest un exemple parfait de technologie au service des acteurs en place !
Sinon, je citerais Weecover qui se positionne sur lâassurance embarquĂ©e. BasĂ©e en Espagne, la startup a signĂ© des contrats avec de grands distributeurs comme la Fnac par exemple, et ce, en gagnant les contrats face Ă des acteurs historiques ! Elle entre actuellement en France, et son infrastructure APIsĂ©e permet aux acteurs avec qui elle travaille de lancer leurs solutions en un temps record !
Enfin, Claimscarbon, startup basĂ©e en SuĂšde a dĂ©veloppĂ© une solution SaaS permettant aux assureurs de mesurer les Ă©missions de CO2 liĂ©s Ă la gestion des sinistres. Câest Ă©videmment un sujet dâactualitĂ©, et lâun des rares outils dĂ©diĂ©s Ă lâassurance. Sans surprise donc, ils grossissent trĂšs vite et au-delĂ des pays Nordiques, sont dĂ©jĂ actifs en Allemagne, Angleterre et Espagne. La France est le prochain pays sur la liste.
đSâil fallait citer une insurtech europĂ©enne remarquable pour sa croissance, laquelle serait-elle ?
En fonction du critĂšre choisi plusieurs noms me viennent en tĂȘte.
Wefox est Ă©videmment impressionnante avec plus de 1.4 Milliard dâeuros levĂ©s depuis son lancement (!?)
Sinon, jâai en tĂȘte Getsafe, startup B2C multi-produits qui semble rĂ©ussir son extension gĂ©ographique : lancĂ©e en Allemagne, elle a rĂ©cemment prĂ©sentĂ© des chiffres intĂ©ressants sur le marchĂ© Anglais, et vient de se lancer rĂ©cemment en France. Affaire Ă suivre donc.
Enfin, je pense Ă +Simple qui est lâune des rares InsurTech Ă ĂȘtre sortie avec succĂšs – lâannĂ©e derniĂšre – et continue son dĂ©veloppement, et mĂȘme lâaccĂ©lĂšre, Ă travers toute lâEurope. Ce nâest pas celle quâon entend le plus, mais les Ă©quipes dĂ©livrent. Câest inspirant !
đQuelles sont selon toi les insurtech qui ont vraiment rĂ©ussi Ă …disrupter le marchĂ© comme on dit ?
En considĂ©rant que lâInsurTech a 3 – 5 ans dâĂ©cart avec la FinTech, je pense que cette industrie est encore trĂšs jeune. Jâen veux pour preuve lâannĂ©e derniĂšre : prĂšs de la moitiĂ© des deals annoncĂ©s lâont Ă©tĂ© sous 3m⏠! Ce sont bien les prochaines annĂ©es, et les prochaines âdisruptionsâ – mĂȘme si je nâaime pas le mot – qui sont en stock parmi ces jeunes pousses.
Je ne suis pas sĂ»r de la dĂ©finition du verbe âdisrupterâ qui est souvent galvaudĂ©, mais il me semble que certaines startups ont indĂ©niablement un impact sur lâindustrie toute entiĂšre : pour ne citer que des acteurs Français, je pense Ă Descartes Underwriting qui a crĂ©Ă© son couloir dans lâassurance paramĂ©trique ; je pense aussi Ă Alan qui a redĂ©fini les critĂšres de lâexpĂ©rience client dans lâassurance santĂ©, ou Ă Shift Technology qui a su imposer sa dĂ©finition du âmarchĂ©â de la fraude dans lâassurance.
đCâest quoi votre dernier investissement chez astoryaVC ?
Le dernier deal annoncĂ© Ă©tait Medsmart. Il sâagit dâune startup basĂ©e en France, qui a dĂ©veloppĂ© une infrastructure de bout en bout, pour digitaliser le remboursement des dĂ©penses de santĂ© hors SĂ©cu. ConcrĂštement, quand tu sors de chez lâosthĂ©opathe par exemple, tu rĂ©cupĂšres une facture papier, que tu dois envoyer Ă ta mutuelle. En interne, des Ă©quipes ressaisissent le document dans leur systĂšme IT pour que le remboursement puisse ĂȘtre effectuĂ©. Câest Ă la fois long et efficace. Medsmart propose donc dâun cĂŽtĂ© un outil pour les praticiens qui peuvent alors Ă©mettre une facture numĂ©rique, qui est envoyĂ©e automatiquement Ă la mutuelle, qui Ă travers son outil dispose immĂ©diatement de toutes les informations nĂ©cessaires au remboursement. Câest bĂ©nĂ©fique pour tous les acteurs de la chaĂźne ! Et au-delĂ des bĂ©nĂ©fices de la solution pour la SociĂ©tĂ©, on est particuliĂšrement contents dâavoir pu co-investir avec de nombreux business-angels du secteur de lâassurance santĂ© !
đComment faites-vous pour spotter les meilleures startups dans lesquelles investir ?
Depuis le premier jour, et Ă©tant donnĂ© notre pĂ©rimĂštre dâinvestissement trĂšs spĂ©cifique (InsurTech x Europe x Seed) nous avons fait le choix de dĂ©velopper notre propre outil de sourcing automatisĂ©. Si des outils existent dĂ©jĂ sur le marchĂ©, ils sont souvent trĂšs centrĂ©s sur les USA et sont toujours gĂ©nĂ©ralistes. On se retrouve avec environ 70% des startups toutes industries confondues, lĂ oĂč notre outil nous permet dâavoir 99% des startups dans lâInsurTech en Europe ! Câest le mĂ©rite du focus.
Cela nous permet Ă©galement d’identifier des startups avant quâelles ne fassent les gros titres, ce qui rĂ©sonne avec notre positionnement en Seed, car nous sommes souvent le premier investisseur dans les startups que nous accompagnons. Enfin, cela est utile aussi bien Ă notre Ă©quipe en interne quâĂ nos investisseurs, qui y ont accĂšs, pour anticiper les tendances Ă venir !
đOn avait posĂ© la question Ă Romain Lavault (ICI), donc on te la pose aussi : on voit beaucoup de belles histoires se dessiner ces derniĂšres annĂ©es en France, est-ce un effet de communication ou y a t-il une vraie Ă©volution de lâĂ©cosystĂšme des startups en France ? Câest quoi ton regard lĂ -dessus ?
Il y a clairement plusieurs mouvements Ă l’Ćuvre. DĂ©jĂ , la France produit dâexcellents ingĂ©nieurs. Câest assez reconnu, et souvent soulignĂ©. Il nây a quâĂ regarder qui gĂšre les initiatives IA de Facebook, Yann Lecun, câest un Français. Au-delĂ de ce bon niveau en recherche et en ingĂ©niĂ©rie, il y a eu de nombreuses initiatives pour rattraper lâĂ©cart avec lâAngleterre et lâAllemagne, en matiĂšre dâinvestissement. Avec plus dâargent public, des incentives, et mĂȘme au plus haut niveau politique une implication dans âla startup nationâ pour reprendre les mots du PrĂ©sident.
Du point de vue InsurTech, la France nâa pas Ă rougir et est clairement un acteur majeur. DerriĂšre lâAngleterre, assez logiquement, mais trĂšs souvent devant lâAllemagne. Si les points Ă©voquĂ©s ci-dessus expliquent en partie cette dynamique, il est aussi Ă noter la prĂ©sence dâassureurs internationaux, dâun riche Ă©cosystĂšme Mutualiste, et du meilleur exemple de bancassurance au monde. Bref, les startups ont de qui sâinspirer ou de nombreux acteurs Ă servir !